mardi 20 décembre 2011

Hizb ennour au Maroc...une question de temps


1. 2011, un RDV avec l'Histoire
L'année 2011 aura été un tournant décisif pour le monde arabe. Cela a commencé avec l'inespéré départ de BenAli, qui s'est suivi de celui de Moubarak, puis Kadhafi, puis Saleh...et el Assad en route.
Le constat est que les régimes les plus dictatoriaux ont été les premiers sur la liste (l'Algérie faisant exception du fait du drame vécu dans les années 90, avec plus de 150 000 morts, et la prudence populaire devant un nouveau soulèvement).



Seulement voila, chez nous au Maroc, il a fallu que le changement prenne une autre voie, celui du changement par l'intérieur...non je ne parle pas du ministère.
Le PJD a gagné les élections (partiellement, vu qu'il doit s'allier à 3 autres partis de tendances contradictoires pour gouverner). Cette alliance a fait couler beaucoup d'encre, et de l'eau coulera sous les ponts avant que les promesses électorales ne voient le jour.

2. Le PJD, les frères, même combat?
Le PJD est un parti très similaire aux frères musulmans Egyptiens, qui ont près d'un siècle d'existence. Ils ont souffert, été torturés, humiliés, exécutés et persécutés au long de leur existence. L'an 2011 a été pour eux une opportunité historique qu'ils ont saisi. Ne faisant pas partie des manifestations au début, ils ont vite senti le vent du changement et ont pris part à la fronde. Nul doute que leur organisation et leur structure a grandement participé a leur victoire aux élections.

Néanmoins, avec le temps, leur idéologie s'est policée. Il n'est pas nécessaire de rappeler que pour sayyed Qotb, il fallait l'établissement de l'Etat islamique, la charia, et qu'une partie des Égyptiens ne méritait même plus d'être considérée comme musulmane. Aujourd'hui, les frères sont plus dans la rhétorique et la voix conciliatrice. Il ne parlent plus de charia, ni d'état islamique, mais d'état civil et de lois parlementaires. Ils ont compris que pour arriver à leur fin, et donc êtres crédibles aux yeux de l'occident. Leur discours porte sur le combat contre la corruption, l'économie, les politiques sociales...de très bonnes choses, mais on a mis au tiroir ce qui fait débat.
Mais alors, de deux choses l'une:

  • Soit, ils ont des plans à long terme, ils n'ont pas perdu leur référentiel et compte accéder au pouvoir d'abord et ensuite discuter des principes de l'islam.
  • Soit, à force de verser dans le discours policé, on finit par s'en convaincre soit-même...
3. Et eux alors?
Et c'est justement du fait de la très grande probabilité de cette seconde hypothèse qu'apparaît à leur droite un parti venu de nulle part, qui n'a aucune histoire politique, mais qui en moins de 10 mois, s'est taillé une part non négligeable des sièges parlementaires. Ce parti n'est autre que Ennour, qui se réclame du salafisme.

Ce parti a séduit l'aile droite de l'électorat des frères ainsi que les éternels abstentionnistes qui considéraient que les frères ne les représentaient pas. Mais le plus surprenant, c'est le taux prédit par les politologues, nationaux et étrangers. Ces derniers créditaient Ennour de 5% des voix, tout au plus. Et voila qu'il en récolte entre 25 et 35. On est en droit alors de se poser la question, d'où viennent ces électeurs? 35% ce n'est pas rien. Cet électorat qui n'appréciait plus l'éloignement progressif des frères de leurs idées fondatrices.

Il est tout d'abord nécessaire de s'arrêter sur un point. Pas plus qu'un an avant les élections, les conservateurs considéraient la démocratie comme étant illicite, car son principe fonctionne sur l'égalité entre tous au moment du vote, chose qui est contraire à l'islam, qui ne donne pas la même place lors du témoignage au menteur et au sincère, au pervers et au juste, au savant et à l'ignorant...Mais ils ont fait un virage à 180°. Ceci est à leur crédit, car ça montre un certain pragmatisme (et non une hypocrisie, ou autre double-langage) quant au traitement des situations d'urgence. Et c'est prometteur pour le futur car ils devront aussi faire preuve de pragmatisme s'ils sont un jour au pouvoir pour traiter les situations d'urgence, comme l'a fait le Calife Omar lorsqu'il a refusé d'appliquer le jugement de l'amputation de la main en temps de famine.

4. Pendant ce temps là, non loin de l'atlantique
Ce qu'il faut savoir, c'est que le Maroc ne devrait empiriquement pas échapper à ce scénario. Dans les années 1970, le pouvoir a favorisé la montée des conservateurs au Maroc pour calmer la gauche, révolutionnaire à l'époque avec l'UNFP. Depuis un certain assassinat, les temps ont bien changé, et le makhzen a changé son fusil d'épaule. Mais depuis l'avènement du web, ceux-là mêmes qui ont à leur tour été persécutés pour leurs idées conservatrices ont trouvé une tribune. Ils ont par ailleurs été très influencés par les enseignements orientaux qui apportaient un nouveau souffle à l'Islam local.

Toute la question est de savoir, quelle part de la population représentent ces gens-là?

Pour y répondre, il faut garder à l'esprit qu'à l'ère des media globaux, et des la mondialisation de l'information, nul ne peut nier son existence. Nul ne peut nier qu'il a poussé le PJD au pouvoir lors des dernières élections. Mais nul ne peut nier qu'une partie de cet électorat ne vote pas.


Il serait intéressant de savoir quelle est la part des sympathisants du PJD et de Al Adl qui adhérerait immédiatement aux idées d'un parti conservateur type Ennour au Maroc, ainsi que la part des abstentionnistes qui en ferait de même.

Allahu a3lam

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire