C'est fait, la BCE vient de franchir un cap historique. Le taux directeur est à son plus bas. Un scénario à la japonaise. Les bourses s'emballent immédiatement après la décision puis viennent les corrections, que se passe-t-il?
En effet, les analystes s'attendaient plutôt, à l'instar de la banque d’Angleterre, au maintien du principal outil de la politique monétaire de la BCE à son niveau d'Octobre. Mais plusieurs facteurs ont poussé Mario Draghi à changer de cap in extremis.
Prenons un peu de recul par rapport à un tel taux, quelle est sa signification? La BCE prête à 0,25% dans un contexte ou l'inflation est à 0,7%. Dit plus simplement, la BCE fait tout ce qu'elle peut pour injecter encore plus de liquidités dans un système qui n'en veut pas. Les banques rechignent à emprunter et à prêter car les perspectives économiques ne sont pas des plus joyeuses. En fait, corrigé de l'inflation, le nouveau taux donne un taux d'intérêt réel négatif. Ainsi, la BCE prête aux banques et les rémunèrent pour venir emprunter chez elle. Un scénario complètement inédit, à la japonaise durant les années 90.
Le taux d'intérêt réel est donc de -0,45%. On emprunte et on se fait payer pour ça!
D'un point de vue macroéconomique, cela signifie que les perspectives d'investissement sont étroites, que le moral des investisseurs n'est pas très joyeux, et que les principaux agents économiques anticipent une stagnation voire une baisse de l'activité. Cette décision intervient moins d'une semaine après la révision des prévisions de croissance pour la zone euro, qui ont carrément été divisées par 2, pour passer de 1,2% à 0,6%, soit quasiment la stagnation économique pour l'année à venir.
Pourquoi la reprise a-t-elle été aussi éphémère? Où sont passés les trilliards de dollars injectés par les Paulson et consors aux USA et en Europe, et financés par le contribuable et engloutis par les financiers? Vraisemblablement, le système économique, ou plutôt le modèle économique occidental basé sur la dette et la spéculation arrive à saturation. En effet, pour rembourser l'intérêt, il faut sans cesse gonfler le principal et donc créer plus de monnaie à travers plus de crédit. Mais nous arrivons à un stade ou tous les ménages sont endettés à court, moyen et long terme, ce qui fait que ça ne tourne plus aussi vite. Est-ce donc la fin d'un modèle basé sur le couple intérêt-croissance, avec l'effet de cliquet comme épée de Damoclès? La BCE est-elle à court d'outils, l'intérêt ne faisant plus ses preuves? Se dirige-t-on vers un scénario à la japonaise où malgré les taux d'intérêt réels négatifs, l'activité ne reprend plus, et le seul moyen de s'en sortir est de dépasser les 200% de dette par rapport au PIB? Quels enjeux un tel scénario a-t-il au moment où l'on entend de plus en plus parler de finance islamique qui fonde son mode de fonctionnement non pas sur les intérêts et la spéculation mais plutôt sur le partage des risques et des profits ainsi que sur l'économie réelle?
Autant de questions que les événements à venir nous aideront à mieux cerner
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